Courir à son VO2 ; pour une autre approche des fractionnés

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I

invité

il est possible de se dire que sur une même modélisation de fractionnés ( 30/30 ou plus longs) on peut viser des objectifs bien différents en fonction de la manière dont on va la mettre en place .

Ce fil reprend certaines réponses et apporte quelques pistes en complément .
Il reste évidemment totalement incomplet , n'a pas la prétention de faire le tour de la question ....
allez-y pour l'amender, apporter vos expériences, enrichir l'information .... !!

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Aborder la notion de travail par intervalles c'est évidemment s'interroger sur les point suivants :
> Quel est l'effet recherché ?
> Quelle est la filière énergétique travaillée?
> Quelle sera la durée intermédiaire pour chaque intervalle ?
> Quelle durée cumulée sur la séance ?
> Combien de temps de récupération ?
> Que fait-on avant ? après?
> Quand placer la séance au sein de sa préparation ?
etc ...

Mais reste une autre question essentielle :
Sur quel indicateur je me base pour déterminer mon niveau d'intensité ?

Prend-on un % de FC .... ou un % de VMA ?

En réalité les deux ont leurs intérêts :D


1. La modélisation basée sur la VMA

Le principe de base est celui de calibrer les intervalles sur un certain % de VMA (donc vitesse)

La limite de ce choix est la notion même de vitesse . En effet maintenir une certaine vitesse est nécessairement limitatif dans la durée .

Sur ce type de modélisation on sera plutôt sur recherche de vitesse très élevé rapidement, ce qui va fortement induire une importante dérive lactique (montée des lactates dans les muscles ) avec des temps de récupération dont le but sera de faire descendre rapidement la FC

A la fin de chaque frac la VMA est maximale .

Ce type de modélisation implique une dérive lactique importante
Effectuer les fractionnés très vite et assez proche de son max va certes apporter beaucoup d'oxygène au niveau des muscles mais il y aura aussi beaucoup de consommation musculaire ce qui conduira à une forte production de lactate ( dérive lactique )

Du coup on va arriver à un déséquilibre à savoir que l'on va produire plus de lactate que l'on va amèner d'oxygène aux muscles

Ce type de modélisation garde bien évidemment tout son intérêt lorsque l'on veut travailler la résistance à la fatigue provoquée par charge lactique
Par ailleurs étant sur des vitesse très élevées , on est sur une amplitude de foulées qui est maximale on travaille donc aussi fortement la puissance



2. La modélisation basée sur la consommation d'oxygène (VO2)

Moins connue cette autre méthode est déjà ancienne, elle a été reprise dans les années 2000 notamment par un ex cycliste professionnel du nom de GIMENEZ qui a donné le nom à une séance de torture bien connue des cyclistes.
Récemment elle a de nouveau été reprise et affinée par JP MONCIAUX et BILLAT .

Elle consiste à atteindre le maximum de consommation d'oxygène et à y rester le plus longtemps possible. La modélisation ne fait donc pas intervenir directement et prioritairement la VMA.
Le but du jeu est de provoquer une dérive lente de la capacité respiratoire puis de rester un long moment (15' minimum) sur un temps de soutien .

BILLAT et JP MONCIAUX ont repris ce que les entraineurs russes de la "grande époque" exploitaient déjà, toutefois avec leurs grandes compétences en physiologie, associées à des études sur le terrain , ils nous permettent de comprendre pourquoi la modélisation est efficace !

Sur ce type de séance l’important est le temps passé à VO2Max sans que celui-ci soit trop vite pondérer par une forte montée des lactates du à la haute vitesse .
Au final l'objectif est donc de passer le plus de temps possible en zone très proche de sa VO2Max sans courir pour autant longtemps à haute vitesse pour atteindre ce palier.


Le principe général est basée sur deux règles importantes :

> règle n°1 : Au fil des fractionnés on va travailler la montée progressive de la FC max pour l'amener vers un plateau.
> règle n°2 : on va aussi maîtriser sa vitesse sur les courtes phase de récupération


En permanence la vitesse est donc maitrisée :
> sur la phase de travail
> mais aussi et peut-être surtout l'intensité est maîtrisée sur la phase de récupération !

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Première piste : les intervalles courts répétés longtemps dans la durée



Comment s'y prend-on ?
On se place EN PROGRESSIVITÉ avec une intensité bien en dessous du maxi possible dans les premiers fracs
Le but de la manip est de gérer sa vitesse pour laisser progressivement au fil des fractionnés monte la FC (cela peut prendre 4 à 7 minutes de 30/30)

.... Et on place entre chaque frac ( de 30'' à 1' voir 1'30'') des récupérations qui se feront en maîtrisant la vitesse pour rester sur un FC assez haute (70% de FC) et surtout reprendre un indispensable relâchement qui favorisera une bonne oxygénation ( le relâchement étant moins consommateur d'oxygène )

La notion de relâchement est fondamentale c'est elle qui va pouvoir permettre une optimisation de la montée progressive de la FC .

Hors dès l'instant où l'on augmente la FC on devient alors très consommateur d'oxygène.
Et plus on consomme d'oxygène plus les muscles sont oxygénés ....


Exemples de modélisation , en fonction du niveau d'expertise :

> 3 x (12' de 30/30) (récup très courte , relachée entre les blocs et sur une FC de 70% )
> 2 x (15' de 40/20)
> 3 x ( 10 x 1'/45'' )

3 blocs de 30_30.jpg

'O2_1.jpg

ou encore deux modélisations extrêmement utilisés par les cyclistes de haut niveau :
le célébrissime "Gimenez" et son frère le "casse"

A chaque fois avec la même problématique
celle de maîtriser la vitesse des fracs pour maîtriser la dérive lactique .

Encore une fois Il ne faut pas chercher à très vite "titiller" la FC max, l'important est de monter progressivement sur sa VMA et sa FC max

Un plateau à tenir longtemps dans la durée
Autre point il est important que la FC arrive progressivement sur un plateau (mini 90% - 95% de Fc)
Lorsque celui-ci sera atteint on va le tenir (15 minutes est un minimum ; pour les Elites on peut le faire tenir 30 minutes )
Attention il est important de se donner le temps pour atteindre cette intensité , si on monte trop vite on ne maîtrisera pas la dérive lactique et celle-ci bloquera le muscle qui ne pourra pas tenir longtemps dans le temps

Pourquoi cette durée minimum de 15 minutes ?
En dessous l'accélération sera trop forte et on va enclencher une forte dérive lactique.

Pour arriver à un des principaux objectif de la séance il faut monter au dessus de 90% de Fc max et cumuler ensuite à minima 15 minutes

Donc sur les derniers fractionnés on restera sur une forme de plateau de FC élevé ( très proche de la FCmax) et derrière chaque phase de récupération sera réaliser sur une course maîtrisée en relâchement



Quel terrain ?

Attention à l'objectif visé !!

>> sur forte côte
on va travailler la dynamique du passage du pied sous la hanche , la dominante est un travail musculaire en puissance (à l'identique de ce qui se fera sur du travail sur escaliers par exemple)

>> sur du plat
C'est là que l'on va travailler l'aspect "relâchement optimisation de l'apport en oxygène" !!

C'est sur ce type de séance que l'on repoussera le seuil de fatigue liée au manque d'oxygénation ; en effet c'est sur ce type de travail que l'on va apporter le maxi d'oxygène au muscle .
Travail tout à fait intéressant puisque plus un muscle va recevoir un apport en oxygène plus il sera résistant dans le temps .
Et là encore ce phénomène est étroitement lié au relâchement

Permettre de travailler longtemps dans le temps est l'enjeu majeur de ce type de séance .

En effet contrairement à une séance construite sur la VMA où l'on va nécessairement se retrouver avec la barrière de la vitesse qui est forcément limitative dans le temps , quand on est sur travail ciblée sur la consommation d'Oxygène on pourra plus facilement travailler longtemps dans le temps puisque l'on va maîtriser sa vitesse sans chercher à la monter à très forte intensité. On va optimiser la consommation d'O2 tout en maîtrisant la vitesse.
Le but c'est d'amener un maximum d'oxygène aux muscles tout en maitrisant la dérive lactique.



Seconde piste : autour du seuil de l'allure course : le yoyo "dessus/dessous"


Cette séance vise essentiellement la capacité à encaisser les accélérations et les variations d'allure....

Eh oui même les tous meilleurs mondiaux ne font pas un semi, un marathon et à fortiori un trail sur un tempo de métronome ....

Le but du jeu est d'augmenter les capacités d'oxygénation à l'allure course .
Pour cela on va s'habiter à courir au dessus de cette allure pour apprendre à l'organisme à maîtriser la dérive de la FC vers le haut .... hors plus la dérive de Fc sera faible plus la dérive lactique le sera aussi ...

Et parallèlement à cela on va travailler aussi sur les phases de récupération controlée le relachement de la foulée ou de la glisse pour un skieur

Voilà pourquoi on peut dire que cette modélisation de séance va renforcer l'économie de consommation d'oxygène dans le temps

Comment s'y prend-on ?

séance préalable :
cas N°1 : le coureur est expérimenté , il connait sa vitesse moyenne ascensionnelle sur un longue bosse ( pour un traileur ou skieur alpiniste par exemple) ou s'il est marathonien il connait son allure marathon, si c'est sur un entrainement en vélo avec un capteur le juge de paix sera la puissance en watt
cas N°2 : le coureur est "novice" et il lui faudra mettre en place une séance pour déterminer sa VMA ( ou passage d'un test d'effort clinique)

Lorsque la donnée est connue on procède ainsi pour structurer la séance :

>>>> un 20' échauffement en progressivité qui va conduite sur l'allure course ( avec l'habitude et la confiance en ses ressentis en un minimum de pratique on peut très facilement se caler dessus .... )

>>>> Lorsque l'allure course est atteinte on va alors jouer au "yoyo" autour de cette allure .
En structurant ainsi la séance :
3' légèrement au dessus de l'allure (on va très schématiquement avec un repère de Fc de 90%-92% de Fc max)
suivi par 3' légèrement en dessous ( on baissera de 2-3% de la Fc identifiée à l'allure course , si elle est à 88% on passera à 85% )

>>>>> et ainsi de suite sur 30 à 45'

Une séance de référence pour connaître ses progrès .... et son niveau de forme
Vous l'avez compris sur ce type de séance l'objectif visé est de pouvoir monter un peu au dessus de son allure course sans forcément exploser le compteur de la FC sur les premiers yoyo !
Donc plus on avancera vers son pic de forme plus la dérive de la FC sera faible .

En début de reprise du travail foncier il sera sans doute difficile de limiter cette dérive qui va progressivement monter mais l'entrainement de ce type de séance permettra de limiter la dérive de FC malgré une augmentation du nombre de yoyo " un peu au dessus de la vitesse de course/un peu en dessous)

2_2 cinétique O2.jpg

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contrairement aux séances à forte charge musculaire comme celles de l'endurance de force ce type de séance peut se faire jusqu'à l'entrée dans le cycle d'affutage avant l'objectif visé

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A retenir ...
1. le cumul du temps passée au dessus du seuil 2 doit être de 15 minutes minimum

2. la progressivité dans la montée de la dérive positive de FC , car si on se la joue "gros bras" en y allant un peu trop fort sur les premiers fracs on va favoriser une rapide dérive lactique ( c'est à dire rapide accumulation de l'acide lactique) ce qui aura pour conséquence de se voir bloquer par les jambes dures avant même d'être allé sur son potentiel maxi de VO2 et de pouvoir le tenir suffisamment longtemps.

3.le contrôle de la dérive de FC et le relâchement de la foulée sur les temps de récupération intermédiaire : en restant sur une dérive modérée on restera sur une forte oxygénation qui limitera elle même la dérive lactique

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source :
Thèse de doctorat de Y. LE MEUR "les strategies d'allure dans la performance sportive de haut niveau : analyse des variabilites et expose des phenomenes explicatifs (2010)

GP Millet , VE Vleck " Physiological and biomechanical adaptations to the cycle to run transition in Olympic triathlon: review and practical recommendations for training.
édition : Sports Med. ( 2000)

http://www.billat.net/index.php/fr/running-research-for-health-and-performance.html

On peut retrouver plusieurs conférences pédagogiques sur ce concept
ici par exemple avec J.P MONCIAUX (entraineur expert sur la préparation des marathoniens)
[video=youtube;15-PuV4YEu4]http://www.youtube.com/watch?v=15-PuV4YEu4&feature=relmfu[/video]

Mise à jour

voilà une autre séance ou l'on peut visualiser la forte tenue sur le temps limite maxi passé à VO2 max , le fameux concept du "tlm VO2max " .

pour en savoir plus , voilà un article détaillé sur le sujet :
rédigé par : Richard Heubert, Valéry Bocquet, Jean Pierre Koralsztein,et Véronique Billat

http://staps.nantes.free.fr/L3/entrainement/aerobie/effet_4_sem_entrain_sur_vo2max.pdf


Cette séance a été faite par une cycliste sur un home traineur
VO2max yoyo dessus_dessous.jpg

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Deux exemples de séances de cinétique d'O2 type " yoyo"
> un peu en dessous de l'allure course / un peu en dessous

Une qui atteint l'objectif :
yoyo V02.jpg

....et l'autre ou l'effort manque de contrôle avec des relâchements trop importants entre les fractionnés , du coup la durée passée au dessus du seuil 2 n'est pas assez importante pour aller vers une amélioration significative du VO2
cinétique yoyo.jpg



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On peut donc noter deux axes à travailler, ce que je fais dans mon thread MEMs Cobayes inside pour les intimes :D VIP forever

Deux axes différents :

>> on veux travailler la résistance à la montée des lactates :
Dès les premiers fracs on se lâche ....la dérive de la Fc au fil des fracs sera donc rapide , la récupération sera courte et maîtrisée pendant 30'' sur une dérive de FC de -10 puls en dessous du max atteint .
Très vite les jambes vont durcir , il va falloir résister aux lactates !
Attention "le casse" porte bien son nom .... on est sur une séance très dure !!


>> on veut travailler la cinétique de VO2 et optimiser l'oxygénation :
la dérive de la Fc au fil des fracs sera plus lente (les premiers fracs seront moins explosifs) les relâchements peuvent être un peu plus long ( 1' 30'' à 2') et placés sur le seuil 1 , en revanche le nombre de répétions sera plus important pour accumuler un temps suffisamment long de forte oxygénation ( 15 à 30 minutes)


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Mise à jour

Deux exemples ou l'on perçoit le fort travail d'oxygénation rendu possible par une montée progressive qui limite l'impact de la dérive lactique ....


pyramidal VO2 indoor.jpgcinétique VO2 sur 30-30.jpg



Article Terminé !
Clickez sur les fichiers attachés pour les voir en grand, et n'oubliez pas, une plus grosse VO2max c'est une plus grosse cylindrée et donc un facteur important tant pour l'endurance, tant pour la force !!! plus d'air = plus de reps avec plus de poids sur la barre !

@Milka
 

SHOGUN

SAMOURAI DE LA FONTE
membre approuvé
vétéran
Re : Courir à son VO2 ; pour une autre approche des fractionnés

Ben dis donc , tu t'es surpassé ce soir Milka en nous pondant 2 bons articles :nice:
 

bullet

MeM addict
VIP
membre approuvé
vétéran
Re : Courir à son VO2 ; pour une autre approche des fractionnés

c'est pas mon truc le cardio,surtout avec se qui me tombe dessus en se moment
mais respect pour ton boulot M.GRAPHIQUE
 

barbarrian

bodybuilder
Membre du Staff
supermodo
Re : Courir à son VO2 ; pour une autre approche des fractionnés

merci pour ton partage : Nice:
 
I

invité

Re : Courir à son VO2 ; pour une autre approche des fractionnés

Ben dis donc , tu t'es surpassé ce soir Milka en nous pondant 2 bons articles :nice:

Oui, mais c'est plus un gros job de compilation d'infos.
Je suis dans ma phase partage d'articles, encore quelques un qui doivent arriver :D
 

HADES

MAITRE DES ENFERS
membre approuvé
vétéran
Re : Courir à son VO2 ; pour une autre approche des fractionnés

Un article très intéressant ! L'endurance est une qualité physique que j'admire.

Merci Milka, je ne peux plus te mettre de réputation mais le coeur y est.
 
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