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"Le stretching avant ou après l’exercice physique ne réduit pas les courbatures musculaires ni le risque de lésions"
Rob HerbertLe stretching des muscles avant et après un exercice physique est généralement considéré comme une pratique bénéfique ; il permettrait d’atténuer les courbatures et de diminuer le risque de blessures musculaires. Mais selon les données les plus fiables disponibles, tout cela n’est qu’un mythe.
Origine du mythe
Étirement et prévention des courbatures
L’origine de ce lieu commun reste floue. Au cours des années 1960, le physiologiste de l’exercice Herbert de
Vries, de l’Université de Californie du Sud, a répandu l’idée que les courbatures musculaires, ressenties dans
les jours suivants un exercice physique, sont dues à des spasmes musculaires ou contractures musculaires.
Selon lui, l’exercice provoque une ischémie musculaire douloureuse qui provoque à son tour une contraction
musculaire tonique réflexe, elle-même douloureuse,créant ainsi un « cercle vicieux de douleur-contracture-douleur». Toujours selon De Vries, le bénéfice d’un étirement musculaire après exercice est l’inhibition réflexe
de la contracture musculaire, qui rompt le cycle douleur-contracture-douleur. Il a réalisé un certain nombre
d’études dont l’objectif était de démontrer que la fatigue des fléchisseurs du coude, induite expérimentalement,est associée à une augmentation de l’activité électromyographique et que les étirements musculaires peuvent réduire cette activité. Ce raisonnement a encouragé la pratique des étirements après l’exercice, mais il est actuellement discrédité.
En fait, les courbatures et les douleurs musculaires ne sont pas liées à l’activité tonique du muscle mais elles résultent de lésions de ses sarcomères ou sarcolemmes.
Étirement et prévention des blessures
On peut néanmoins comprendre le raisonnement d’un lien entre l’étirement musculaire et la prévention du
risque de blessure. Les lésions aiguës des tissus mous se produisent lorsque ces tissus, comme le muscle, sont soumis à un niveau de contrainte trop élevé. Les étirements induisent une déformation visqueuse du tissu mou. Ce qui signifie qu’il éprouve moins de tension pour une même contrainte. C’est pourquoi il était pensé que les muscles étirés avant une activité physique, n’étaient pas exposés au même niveau de contrainte, et que le risque de blessure était moins grand.
« En fait, les courbatures et les douleurs musculaires ne sont pas liées à l’activité tonique du muscle
mais elles résultent de lésions de ses sarcomères ou sarcolemmes. »
mais elles résultent de lésions de ses sarcomères ou sarcolemmes. »
Comme pour toute intervention clinique, la vérité scientifique de l’étirement ne repose pas sur la vraisemblance des mécanismes d’action postulés mais sur la preuve expérimentale. Peut-on démontrer qu’un
groupe de sujets s’étirant avant ou après une activité physique a moins de courbatures ou de blessures qu’un groupe strictement comparable qui ne réalise pas d’étirement ? La seule manière de générer des groupes comparables est de randomiser les participants dans les groupes. En conséquence, si nous voulons des données solides sur l’effet des étirements nous devons regarder les résultats provenant d’essais randomisés.
Que nous apprennent les essais randomisés sur le stretching ?
Les courbatures
Récemment, Marcos de Noronha et moi-même avons réalisé une analyse systématique des essais randomisés portant sur les effets de l’étirement sur le risque de lésions musculaires [6]. Nous avons identifié et analysé dix essais : neuf conduits au sein d’un laboratoire et un réalisé chez les footballeurs effectuant des étirements après les matchs. Tous les participants étaient de jeunes adultes en bonne santé. Trois études se sont penchées sur les effets de l’étirement avant l’exercice et sept autres sur les effets de l’étirement après l’exercice. Pour deux études post-exercice, l’étirement était effectué par séances répétées à un intervalle de plus de deux heures.
La durée cumulée totale d’étirement au cours d’une séance allait, selon les études, de 40 à 600 secondes.
Il y avait un haut degré de concordance à travers les essais qui estimaient les effets des étirements : tous montraient un effet quasi-nul des étirements. L’estimation globale obtenue à partir de l’ensemble des dix essais a montré que les étirements pré-exercice permettaient une réduction des courbatures musculaires un jour après l’exercice d’une valeur moyenne de 0,5 point sur une échelle de 100 points (IC 95 % de -11,3 à +10,3 ; trois essais). Les étirements post-exercice permettraient une réduction des courbatures musculaires un jour après l’exercice d’une valeur moyenne de 1,0 point sur une échelle de 100 points (IC 95 % de -6,9 à +4,8 ; quatre essais). Des effets similaires ont été mis en évidence d’un jour et demi à trois jours après l’exercice.
Ces résultats, principalement obtenus grâce aux études de laboratoire, nous apprennent que le stretching musculaire ne réduit pas de façon perceptible la douleur musculaire tardive chez les jeunes adultes en bonne
santé.
Implications pratiques
Les implications pratiques sont assez claires. Pour la plupart des auteurs, l’importance des effets, en termes de prévention des courbatures musculaires ou de risque de lésions, est tellement faible que l’étirement avant ou après l’activité physique ne peut pas se justifier.
En conséquence, si l’objectif est de réduire les courbatures musculaires ou de limiter le risque de lésions, les kinésithérapeutes ne devraient pas conseiller aux patients de s’étirer avant ou après une activité physique.
Bien entendu, il y d’autres motifs pour s’étirer que la réduction des courbatures musculaires ou du risque de
se blesser. Certaines personnes croient que le stretching favorise leur performance physique. Les données disponibles sur ce point sont assez ambivalentes. Pour d’autres, les étirements permettent de se détendre et ainsi mieux se préparer à faire tel ou tel exercice.
Chaque individu peut se faire sa propre opinion concernant ce genre d’effet.
Il faut noter que les études considérées dans cet article portaient sur les effets de l’étirement et non sur les effets de l’échauffement. En général, un programme d’échauffement comporte des étirements et des exercices à faible intensité. En ce sens et en termes de réduction du risque de lésions et des courbatures musculaires, les résultats disponibles sont en faveur d’un effet bénéfique des programmes d’échauffement bien adaptés.
Références:
PhD, MAppSc (ExSpSc), BAppSc (Physiother) NHMRC Senior
Research Fellow Associate Professor, the George Institute for international health.
Texte traduit par M. Pope (Elsevier Masson) et finalisé par Pierre
Trudelle
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